Dans moins de deux ans, toutes les entreprises soumises à la TVA en Belgique devront échanger des factures sous forme de fichiers structurés, conformément à une norme internationale. Fini les factures en PDF, en Word ou par la poste, elles devront être lisibles et traitables par la plupart des logiciels de facturation. Cette transition vers la facturation électronique s’inscrit dans un contexte plus large de réformes visant à moderniser la collecte de la TVA, telles que le programme ViDA (« VAT in the digital age ») au niveau européen.

Les fondements de l’e-facturation en Belgique

Contexte de l’e-facturation en Belgique

Bien que l’entrée en vigueur de la facturation électronique au niveau européen soit prévue pour 2028, la Belgique a anticipé cette échéance. En effet, en octobre 2023, le gouvernement a sollicité une dérogation à la Commission européenne afin de pouvoir mettre en place la facturation électronique avant l’adoption de la norme européenne.

La législation belge imposera l’utilisation de factures électroniques structurées à partir de 2026 pour les entreprises belges établies et enregistrées à la TVA locale. Les factures devront être conformes à la norme Peppol-BIS et transmises via le réseau Peppol (Pan-European Public Procurement Online), mettant ainsi fin à l’usage des factures papier et des formats non structurés tels que le PDF. Cependant, le secteur B2C est exclu de cette réglementation, qui ne s’applique donc qu’au secteur B2B.

Déploiement de l’e-facturation

Le déploiement de la facturation électronique se fera en plusieurs phases, avec des échéances précises :

  • 1er janvier 2024 : la réception des factures électroniques sera obligatoire pour la plupart des organisations belges
  • 1er juillet 2024 : les petites et moyennes organisations devront être en mesure d’accepter et de traiter des factures électroniques, tandis que les grandes entreprises devront déjà pouvoir en émettre
  • 1er janvier 2025 : les petites organisations pourront également émettre des factures électroniques
  • 1er juillet 2025 : les micro-organisations rejoindront le mouvement de facturation électronique
  • 1er janvier 2026 : le reporting électronique deviendra obligatoire pour toutes les organisations belges
  • 1er janvier 2028: l’ensemble de ces nouvelles règles sera pleinement applicable à toutes les organisations en Belgique

Pour faciliter la transition vers la facturation électronique, le gouvernement belge a pris conscience des défis auxquels les entreprises peuvent être confrontées. Une initiative fiscale ambitieuse a donc été mise en place pour encourager les entreprises à adopter cette nouvelle pratique. Cette mesure leur permettra de réclamer des déductions fiscales sur certaines dépenses liées à la mise en œuvre de la facturation électronique. Plus spécifiquement, le gouvernement belge a instauré une déduction fiscale de 120% pour les investissements réalisés dans des plateformes de facturation électronique, sur la période imposable de 2024 à 2027.

Les dépenses éligibles à cette déduction comprennent l’acquisition, l’installation et la formation nécessaires à l’implémentation de systèmes de facturation électronique. En offrant un cadre financier avantageux, le gouvernement belge incite les entreprises à franchir le pas vers la facturation électronique, tout en facilitant leur transition vers ce nouveau mode de gestion des transactions commerciales.

Avantages économiques et environnementaux

L’introduction de la facturation électronique dans le paysage économique belge présente plusieurs avantages.

Tout d’abord, cette transition vers l’e-facturation est justifiée par des considérations écologiques, car elle réduit considérablement la consommation de papier, contribuant ainsi à préserver l’environnement. De plus, elle est présentée comme un moyen efficace de réduire la charge administrative des entreprises, ce qui pourrait se traduire par des économies qui, selon l’Agence pour la simplification administrative, dépasseraient les 3 milliards d’euros pour les entreprises de l’Union européenne. Cette mesure vise également à limiter la fraude fiscale, car une fois émises, les factures électroniques sont plus difficiles à manipuler, assurant ainsi une meilleure transparence et une traçabilité accrue des transactions.

Par ailleurs, le gouvernement belge a pour objectif de réduire l’écart de TVA, c’est-à-dire la différence entre les recettes de TVA attendues et celles effectivement perçues. Selon un rapport du Fonds monétaire international, une meilleure collecte de la TVA pourrait apporter jusqu’à 11 milliards d’euros de recettes supplémentaires chaque année à l’État belge.

Intégration de l’e-facturation dans les marchés publics en Belgique

Cadre légal et normatif

La transition vers la facturation électronique en Belgique s’inscrit dans un contexte européen où cette pratique est de plus en plus encouragée. En effet, la directive européenne 2014/55/UE, promulguée le 16 avril 2014, a été le point de départ de cette évolution, en visant à standardiser les échanges de factures électroniques entre les gouvernements (B2G). La Belgique a choisi de généraliser la facturation électronique en B2G à partir de 2022, en déployant progressivement cette mesure en fonction de la taille des marchés publics :

  • 1er novembre 2022 : les factures électroniques doivent être soumises le premier jour de chaque mois pour tous les marchés publics dont le montant est égal ou dépasse le seuil européen
  • 1er mai 2023 : cette obligation s’étend aux marchés publics d’une valeur égale ou supérieure à 30 000 €, avec une soumission obligatoire le premier jour de chaque mois
  • 1er mars 2024 : tous les contrats de moins de 30 000 € sont soumis à l’obligation de facturation électronique

Les affectations budgétaires inférieures à 3 000 € sont exemptées. Cependant, chaque gouvernement aura la possibilité de décider ultérieurement d’imposer cette obligation pour ce type de dépense et de fixer une date limite pour sa mise en œuvre.

Pour faciliter cette transition, la Belgique a opté pour l’utilisation du système Peppol, déjà largement utilisé en Europe pour les échanges électroniques dans les marchés publics. Ce système assure des échanges sécurisés de données entre des points d’accès agréés, harmonisant ainsi le format, la sémantique et la structure des factures. Il offre également l’avantage de ne pas nécessiter l’accord préalable du cocontractant pour l’envoi et la réception des factures électroniques.

En parallèle, l’utilisation de logiciels compatibles avec le format Peppol est largement répandue en Belgique, facilitant ainsi l’adoption de la facturation électronique. De plus, ce système permet une automatisation complète du processus de facturation sans nécessiter d’intervention humaine, ce qui réduit le risque d’erreur et de manipulation frauduleuse.

 

En conclusion, la Belgique s’engage résolument dans la transition vers la facturation électronique, en anticipant les directives européennes et en mettant en place un cadre réglementaire et incitatif. Ce passage vers l’e-facturation, qui s’étale sur plusieurs années, vise à simplifier les processus administratifs, à réduire l’empreinte environnementale et à renforcer la transparence des transactions commerciales. Avec l’introduction de normes telles que Peppol-BIS et l’adoption généralisée de la facturation électronique dans les marchés publics, la Belgique se positionne à l’avant-garde de la numérisation des échanges commerciaux, offrant ainsi de nouvelles opportunités et des avantages économiques aux entreprises tout en favorisant une meilleure gestion des finances publiques.

 

Article rédigé par Sarah Expósito Ragaigne, chargée de communication et marketing digital